Cuiry-lès-Chaudardes tranchées vue du ciel

Localisation des sites du rubané et du groupe de Villeuneuve-Saint-Germain/blicquy dans le Bassin parisien et en Belgique avec la zone d'étude du programme scientifique de la vallée de l'Aisne
| Les vallées de l'Aisne et de la Vesle ou l'histoire d'un projet scientifique sur la dynamique de l'occupation humaine durant les cinq millénaires précédant notre ère à travers une exploration archéologique programmée Durant trois décennies, le programme archéologique de la vallée de l'Aisne fut un véritable laboratoire d’essai pour une nouvelle archéologie. Il a été mis en place dès 1972 par le professeur Bohumil Soudsky. Son ambition initiale, visant à exploiter une nouvelle base de données archéologiques régionale, dérogeait en effet à des habitudes de pensée et des façons de faire ancrées de longue date. Sur le terrain, la volonté d’appréhender les vestiges archéologiques dans le plus large cadre possible nécessitait le passage d’une archéologie d'urgence, très aléatoire, à une archéologie préventive, contrôlable, permettant de dépasser la découverte hasardeuse. Face à des aménagements industriels toujours plus envahissants, l'ambition scientifique du projet exigeait une accélération des processus de repérage, de fouille et d'enregistrement des vestiges. Les décapages industriels, banals à l'heure où nous rédigeons ces lignes, représentaient en ce sens une opportunité évidente.
Il restait à les surveiller d'abord, puis à les réaliser selon des normes compatibles avec l'observation archéologique. Sur soixante-dix kilomètres de long, quelques centaines d’installations sont donc apparues sous le godet des engins et la pelle des fouilleurs ; la qualité et la variété de ces nouvelles informations croissait avec les surfaces fouillées. C’est ainsi que plus de trente sites majeurs ont été révélés. Ils se distinguent par une richesse, une structuration des témoins archéologiques et une envergure spatiale qui permettent de traiter des problématiques larges et variées, et d'un intérêt dépassant largement le site et sa région ; chacune de ces découvertes a ainsi fortement contribué à réduire le no man's land documentaire qu’était jadis la France du nord non rhénane.
A côté d'une trentaine de sites emblématiques, les nombreuses autres fouilles ne doivent surtout pas être sous-estimées car elles ont révélé le tissu d'occupation de la vallée durant cinq mille ans. Ferme isolée, batterie de silos en plein "champs", parcellaire agricole, tombe isolée, monumentale ou non, occupation de courte durée, dépôts en tous genres, permettent en effet, avec l'identification de zones "vides", d'inscrire les sites majeurs dans la complexité de leur environnement, de mesurer la variabilité du système d'habitat, son envergure spatiale et sa hiérarchisation éventuelle.
L’intérêt de cette information plus modeste glanée dans les décapages tient donc à son intégration dans une stratégie de recherche cohérente, dimensionnée à une échelle appropriée aux dynamiques sociales pré- et protohistoriques.
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